Mémoires des sables, Bruno Paulet

Mémoires des sables, un livre dans la lignée de "Sur les traces de..."
Cette fois, nous partons sur les traces d'Ella Maillart et de Peter Fleming. Ils entreprirent en 1935 la traversée de Pékin aux Indes Britanniques par l'Asie centrale. Un périple qui en fait rêver plus d'un...
Tous deux publièrent un livre, mais en aucun cas le même livre, ils sont très complémentaire. Ella Maillart nous livre comme à l'accoutumée une foule de détails pratiques, alors que Peter Fleming, anglais flegmatique, doté d'un solide sens de l'humour, nous régale de petits apartés.
Ella Maillart s'intéresse beaucoup aux autres et à leurs cultures (comme dans tous ses livres), alors que Peter Fleming détaille davantage la vie quotidienne de cette expédition, le trajet, les paysages, il se détache des contraintes de la vie quotidienne  pour observer le monde vu d' "en haut"...

Suite à leur voyage, Peter Fleming publia "Courrier de Tartarie"  en 1936, et Ella Maillart "Oasis interdites" en 1937. Cette dernière avouait qu'elle avait beaucoup de mal à écrire alors que Peter Fleming adorait rédiger. L'un était écrivain, l'autre une exploratrice, il faut donc lire absolument ces deux livres.


















Revenons à ce livre et à cette traversée réalisée en 2005 par Bruno Paulet, qui a emprunté une toute petite partie de l'itinéraire de nos deux précédents comparses. Nous ne sommes plus en 1935, et réaliser l'itinéraire dans son intégralité n'est tout simplement plus possible.
Bruno Paulet s'est intéressé à la partie que Peter Fleming avait intitulée, non sans humour, "No Picnic". Il embarque Yann Mingard, photographe, et tous les deux tentent jour après jour de faire revivre cet itinéraire. Comme en 1935, les difficultés sont réelles, mais au final pratiquement toujours les mêmes. Vous en jugerez par vous-même à la lecture de ce livre, quant au rôle du guide mongol, de l'alcool, la gestion des bêtes, les fourberies locales et administratives...
Cette région aux confins de la Chine, encore interdite au tourisme, reste méconnue (même par le National Géographic, vous verrez ;-). Les annotations d’Ella Maillart sont parfois plus utiles qu’un GPS ou une carte satellite. Là est tout l’intérêt du tracé, faire parler le terrain pour rejoindre un point de rendez-vous.
Même si les rencontres sont rares sur l'itinéraire, elles laissent de joyeux souvenirs aux deux protagonistes, je vous laisse les découvrir...



Mais ce récit n'est pas seulement une histoire personnelle, il est un inventaire assez complet des expéditions et aventures précédentes. On apprend une foule de détails sur ceux qui ont participé à l'exploration de ces régions difficiles d'accès, qu'ils soient moines, missionnaires, explorateurs (jeunes mariés ou pas;-) et géographes. Vous pouvez compléter ces données sur l'Asie avec le livre Le Grand Jeu de Peter Hopkirk.


Bruno Paulet n’hésite pas à partager ses déboires. Il ne passe pas non plus sous silence les conflits qui peuvent naître dans un petit groupe qui vit en vase clos, ils ont de l'importance sur le coup, puis disparaissent à la fin. Vous vivrez le voyage de l'intérieur. Pas d’apitoiement dans l'écriture, Bruno Paulet garde toujours une part d'humour.

Quarante jours de marche, l’aventure est réussie, et alors me direz-vous?
Et bien lisez-le, et vous vous rendrez compte qu'au final, le voyage avait plus d'importance que la destination finale...

Je vous laisse méditer sur deux phrases de Bruno Paulet : " Les villes sont des aberrations, des miroirs aux alouettes pour déshérités poussés par le sous-développement des campagnes et attirés par les paillettes de la télévision comme des mouches par ...la lumière.(...) La densité humaine n'est supportable que lorsqu'elle est génératrice de culture, cette autre manifestation de la liberté ". Tout est dit !

Mémoires des sables de Bruno Paulet est publié aux éditions Olizane.
Ce livre a reçu le prix Pierre Loti à Hendaye en 2008
Vous pouvez retrouver quelques informations sur son site.

Bonne lecture.

Laurent